Comment protéger des formats d’œuvres audiovisuelles ?

Les formats d’œuvres audiovisuelles ou formules d’émissions n’ont pas reçu de définition légale ou règlementaire et ne sont pas considérées comme des œuvres audiovisuelles dans la mesure où elles n’ont fait l’objet d’aucune opération de montage et de tournage (Tribunal de Grand Instance de Paris, 20 octobre 1993).

Ces derniers constituent des projets qui, en l’absence de formalisation, restent des idées insusceptibles d’appropriation.

Pour autant la jurisprudence ne leur dénie pas la qualité d’œuvre de l’esprit au sens de l’article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle,  leur permettant ainsi de bénéficier de la protection accordée par le droit d’auteur.

Un format pourrait donc être faire d’une telle protection sous réserve de présenter une originalité (i).

Par ailleurs, et même en l’absence de droits privatifs, le titulaire d’un format d’émission peut agir sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire en cas d’une reprise, par un concurrent, des éléments principaux le composant (ii).

Enfin, il est également d’envisager la possibilité de déposer une dénomination à titre de marque notamment pour des services« de production d’émissions télévisées de divertissement »  désignés en classe 41 (iii).

  1. Sur la protection du format d’émission par le droit d’auteur 

La protection du format dépend en premier lieu de son degré d’élaboration qui permet de le distinguer de la simple idée générale, puis en second lieu de son originalité .

La jurisprudence  a d’ailleurs eu l’occasion de rappeler que l’originalité d’un format d’émission de jeu télévisé consiste « en dehors de la forme matérielle, dans l’enchaînement des situations et des scènes, c’est-à-dire la composition du plan, comprenant un point de départ, une action et un dénouement, le format constituant un cadre au sein duquel l’œuvre va pouvoir se développer, soit pour un jeu télévisé, une règle précise décrivant l’atmosphère et la philosophie du jeu, ainsi que son déroulement, la comptabilisation des points, la teneur des questions et leur formulation » (TGI ,3 janvier 2006, SA Métropole Télévision M6 et Sté Eyewoks bv c/ SA Sté nationale de télévision France 2 et SARL WAY).

Ainsi, il a été jugé qu’un format d’émission, ayant pour cadre un paquebot où est situé une intrigue policière que les téléspectateurs doivent résoudre, révèle une activité créatrice de son auteur et est donc original (Cour d’appel de Paris, 19 décembre 1997).

Il en va de même s’agissant d’un projet d’émission qui s’attache à énoncer une règle précise décrivant l’atmosphère et la philosophie d’un jeu ainsi que son déroulement, la comptabilisation des points, la teneur des questions et leur formulation qui constitue « un assemblage original d’éléments connus en eux-mêmes qui révèle l’activité créative de ses auteurs » (Cour d’appel de Paris, 27 mars 1998).

En pratique, l’examen d’un projet de format pourra faire ressortir une description détaillée de son déroulement et préciser les différentes séquences le composant.

Ces différentes séquences pourront être illustrées par des dessins et des détails manifestant des choix précis dans leur élaboration.

Ces étapes pourraient alors relever d’un choix manifestement arbitraire et d’une activité créatrice pouvant donner lieu à une protection par le droit d’auteur.

Dès lors, et conformément aux dispositions de l’article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle, l’auteur de ce format pourra bénéficier de droits patrimoniaux et moraux sur ce format « du seul fait de sa création ».

Pour autant, et nonobstant la formalisation d’un tel projet, il est possible qu’une telle protection soit refusée à ce format dans le cadre d’un contentieux, à raison notamment de l’existence de concepts d’émission similaires.

La jurisprudence a déjà dénié la qualité d’œuvre à un concept d’émission dans la mesure où celui-ci était conçu «  selon un schéma classique » et au moyen «  de procédés connus » ne traduisant «  aucune fantaisie particulire ni un effort de création personnelle » (Cour de cassation, civ.1ère,  2 mars 1999).

  1. Sur la protection du format « Star System » au titre de la concurrence déloyale et parasitaire

En l’absence de droits privatifs, il sera néanmoins possible de sanctionner l’emploi d’un format par un concurrent au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.

En effet, le fait constitutif de la faute résiderait dans le fait qu’une personne aura réalisé, ou fait réalisé, une œuvre à partir des éléments que vous lui aviez confié à l’occasion de pourparlers qui n’auraient pas abouti.

Par ailleurs, il serait également possible d’agir à l’encontre de ce même concurrent au titre du parasitisme économique lequel se caractérise par la reprise, sans bourse délier, de vos investissements intellectuels ayant permis la réalisation de votre format.

Une telle pratique est en effet communément admise par la jurisprudence dans le cadre de la reprise de concepts d’émissions télévisées (Cour d’appel de Versailles, 11 mars 1993).

De telles actions sont toutefois subordonnées à la preuve d’une antériorité sur la création d’un format d’émission.

Il conviendrait de déposer un format sous enveloppe « soleau » auprès de l’INPI ou sous pli cacheté auprès de certaines sociétés de gestion collective (telle que la SACD ou la SCAM) afin de conserver la preuve d’une antériorité certaine.

Cette procédure présente par ailleurs l’avantage d’être peu couteuse (puisque les frais de dépôts relatif à l’enveloppe « Soleau » sont de 15 €) et permet de conserver le format sous pli pendant une durée de cinq ans renouvelable une fois.

(iii). Sur la possibilité de protéger la dénomination de votre format à titre de marque

Enfin, il convient également d’envisager la possibilité de déposer la dénomination du projet à titre de marque notamment pour des services « de production d’émissions télévisées de divertissement » désignés en classe 41.

Pour pouvoir déposer et/ou utiliser cette dénomination, il est essentiel de s’assurer qu’elle ne porte pas atteinte à des droits antérieurs.

Pour ce faire, une recherche d’antériorités complète permettant d’identifier chacune des marques antérieures devra être initiée:

  • soit parce qu’elle reproduirait à l’identique une marque antérieure et désignerait les mêmes produits (contrefaçon par reproduction),
  • soit parce qu’elle constituerait l’imitation illicite d’une marque antérieure en créant avec elle un risque de confusion dans l’esprit du consommateur qui n’a pas les deux marques en même temps sous les yeux. Le juge prend alors en considération essentiellement les facteurs visuels, phonétiques et intellectuels pour procéder à la comparaison entre les deux signes et les produits désignés dans les deux marques (contrefaçon par imitation), ainsi que les dénominations sociales, noms de domaines, noms commerciaux et enseignes couvrant la même activité.
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